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Les malentendus entre soignants et soignés sans-abri sur ce que guérir veut dire.
Laureline Coulomb  1@  
1 : Laboratoire Dynamiques Européennes - UMR 7367  (DynamE)  -  Site web
université de Strasbourg
Maison Interuniversitaire des Sciences de l'Homme - Alsace (MISHA) 5, allée du Général Rouvillois CS 50008 67083 Strasbourg cedex -  France

La présente proposition de communication se base sur notre recherche doctorale portant sur les antagonismes de valeurs, malentendus et négociations dans l'interaction entre soignants et soignés sans-abri. Une ethnographie multi-située1 a été menée en accompagnant les patients sans-domicile-fixe à leurs rendez-vous médicaux, ainsi qu'au sein d'un centre d'hébergement médicalisé, d'un centre de soins et de maraudes médicalisées nocturnes. Des entretiens semi-directifs ont également été réalisés. L'étude et l'analyse des interactions entre soignants, c'est-à-dire ici les médecins et infirmiers, et soignés sdf permet de mettre en lumière la confrontation de deux manières divergentes d'envisager le corps, la santé, la maladie, et, par conséquent, la guérison. Les conditions extrêmes de vie, voire de survie, auxquelles sont confrontés les individus vivant dans la rue les amènent à développer « une manière d'être spécifique »2. Ils élaborent un rapport à leur corps et à la santé qui correspond au savoir spécialisé et empirique qu'ils en ont. Les soignants, quant à eux et de par leur formation et leurs pratiques professionnelles, en adoptent une perception scientifisée et technicisée. On assiste alors, lors de leurs interactions, à une forme d'opposition entre d'une part les hyper-spécialistes de leurs corps que sont les individus sdf et d'autre part les hyper-spécialistes du corps que sont les soignants. Par exemple, il arrive qu'un patient sans-abri décide de quitter l'hôpital parce qu'il s'estime guéri mais, ce faisant, il se positionne contre l'avis médical des soignants qui jugent nécessaire de continuer ses soins. Ils n'envisagent pas de la même manière les étapes qui mènent à la guérison et ne donnent pas le même sens aux traitements chroniques ou aux investigations médicales périodiques notamment, ce qui crée de nombreux malentendus qui peuvent avoir des conséquences néfastes sur la prise en charge médicale de ces patients.

1Marcus George E., « Ethnography in/of the World System: The Emergence of Multi-Sited Ethnography », Annual Review of Anthropology 25, 1995, pp. 95‑117.

2Le Breton David, La sociologie du corps, Paris, Presses universitaires de France, 1992.



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