Donner est une activité complexe au cœur de l'action humanitaire. Au Canada, de nombreux organismes font parvenir des dons de médicaments à leurs partenaires locaux. Ces donations s'inscrivent dans divers contextes dont l'aide humanitaire (p.ex. Health Partners International of Canada), l'aide au développement (p.ex. Collaboration Santé Internationale) et les stages cliniques de formation (p.ex. Infirmières et Infirmiers Sans Frontières (IISF)). Lors des projets d'IISF, il est demandé à chaque coopérant d'apporter une valise de 23 kg de dons.
Une étude d'Aubé et al. (sous presse), réalisée auprès d'un groupe soutenu par IISF au Sénégal, montre que les patients considèrent les médicaments donnés comme plus efficaces que les médicaments locaux. Ces dons mèneraient à une survalorisation du médicament dans le traitement et à la création de faux besoins par les patients. Malgré ces limites, le sens du don semble contribuer à la relation thérapeutique entre le coopérant et le patient. En effet, pour les coopérants, le don pourrait s'inscrire dans les valeurs du caring ainsi que de l'humanisme et permettrait de concrétiser leur «mission». En réponse, les patients interprètent ce don comme une forme de justice sociale grâce à un meilleur accès à des traitements «gratuits et efficaces».
Les coopérants et les patients se retrouvent ainsi au cœur d'une dynamique de don/contre-don et de savoir/pouvoir entre la médecine «humanitaire» (ou biomédecine) et la médecine locale. Quel est le sens du don pour chacun de ces acteurs? Quelle est l'influence du don sur l'expérience de la guérison des patients? Comment ces dons de médicaments contribuent-ils à un métissage des savoirs thérapeutiques locaux? Cette communication, basée sur l'expérience professionnelle terrain et sur les résultats d'une analyse de la documentation scientifique, présentera un portrait de la dynamique entre les dons de médicaments et la relation thérapeutique coopérant-patient.